2. LA POSTE AUX COLIS AUX STATIONS DES CHEMINS DE FER
2.1. Sa création
La poste aux colis fut introduite le 31 mai 1873. Au début, elle ne fonctionnait que sur le réseau de la compagnie Guillaume-Luxembourg (convention du 25-26 juin 1873).
Les premières agences sur ce réseau ouvrirent le 1er juillet 1873. C’étaient: Bettange, Colmar-Berg, Lintgen (fermée le 23.12.75, rouverte le 1.11.87), Mamer, Mertert, Oetrange, Walferdange et Wilwerwiltz. Le 1.1.81 vint s‘ajouter Bertrange-Strassen. [Reis, p. 237 et 198]
Par un arrangement avec les entrepreneurs de diligences, la poste aux colis put être étendue à tout le pays à partir du 1er janvier 1874. [Reis, p. 237]
A la suite d’une convention du 6.8.1874 avec la compagnie Prince-Henri vinrent s’ajouter des agences de la poste aux colis aux gares de Clemency) et de Bettendorf; elles furent fermées temporairement en 1877 et ne reprirent leur service respectivement qu’en 1880 (Bettendorf) et 1881 (Clemency). Entretemps, le 22.7.1880, des agences aux colis avaient été ouvertes à Bissen, Eischen, Noerdange, Reisdorf und Useldange. [Reis, p. 237 et 198]
2.2. Ses services
Si sur les listes de Reis (p. 191 s.) et Poos (p. 160 s.) le nom de l’agence est suivi de la remarque „combiné(e) avec la poste aux colis“, cela signifie que la poste aux colis était desservie à la gare par un employé de la poste qui était également responsable de la distribution à domicile des colis: « Les préposés des relais, outre les travaux de bureau et la distribution, sont dans beaucoup de cas également de service à la gare, de sorte que nécessairement il y a des interruptions dans le service au bureau.» “[Poos, p. 126, trad. F.R.]
Ceux des chefs de gare qui étaient responsables de la poste aux colis recevaient de la poste
une indemnité de 120 F, mais devaient fournir une caution respectivement de 200 et de 300 F. [Reis, p. 236 s.]
Il y avait également des agences aux colis qui n’étaient desservies ni par les chemins de fer ni par la poste. Si elles se trouvaient à proximité d’une station, elles étaient normalement installées au Café/Restaurant/Hôtel de la Gare et gérées par le propriétaire.
La prudence est de mise avec la liste de Poos p. 176 s. Les agences aux colis qui y sont mentionnées sous a) n’étaient pas toutes gérées par des chefs de station, comme le prétend Poos. À beaucoup d’arrêts des chemins de fer à voie étroite il n’y avait qu’une remise à bagages en tôle, donc pas d’employé des chemins de fer et à fortiori pas de chef de station. Une carte-vue de Medernach reproduite ci-dessous montre une telle baraque et, à côté, le splendide « Restaurant de la Gare », dans lequel la famille du propriétaire gérait la poste aux colis.
« A Medernach il n’y avait aucun bâtiment, seulement une rampe de chargement au bout de l’un des deux rails. Ce n’est que huit ans plus tard [1890] que fut construit le restaurant qui devait désormais marquer l’image de la station, mais qui n’avait rien à faire avec la société des chemins de fer à voie étroite. Évidemment il était plus commode d’attendre le train devant une bière dans une auberge bien chauffée. » [Federmeyer: Schmalspurbahnen in Luxemburg, tome I, p. 100, trad. F.R.]
Illustration 4 : La « gare » de Medernach (un piètre abri à bagages) avec, à côté, le Restaurant de la Gare
(Carte-vue ancienne de la collection Roland Schneider)
Federmeyer [ibid., p. 327] relate également la joie des « habitants du petit village de Rippig, qui eurent en 1921 un abri couvert et pouvaient désormais attendre le train à l’abri des intempéries. Le petit bâtiment qui existe toujours [en 1991] ne présentait qu’un grand espace ouvert du côté du chemin de fer. »
Très révélatrice aussi la remarque de Federmeyer [p. 295] concernant la ligne à voie étroite de Luxembourg à Echternach: « La classification en stations et haltes semble plutôt aléatoire. Certaines stations n’ont jamais eu de bâtiment de gare, tandis que de pures haltes pour personnes furent pourvues de constructions dispendieuses. Cela dépendait en grande partie de ce qu’il y avait ou non dans les environs une auberge dont le patron pouvait se charger de la vente des billets. »
A propos de la ligne Bettembourg – Aspelt, Federmeyer fait remarquer p. 251: « À Frisange le patron de la proche auberge se chargeait, en tant qu’agent du chemin de fer, de la vente des billets et de la réception des paquets et des marchandises. » [Il s’agissait de transports effectués par la société des chemins de fer, et non pas de la poste ambulante qui n’existait pas sur cette ligne.]
A la plupart des stations cependant on trouvait les deux : un bâtiment du chemin de fer et une auberge voire un hôtel-restaurant de la Gare, comme le prouvent d’anciennes cartes-vues qu’on peut trouver sur le site www.rail.lu.
2.3. Son organisation
« Voici comment fonctionne le traitement des paquets arrivés: D’abord les adresses d’accom-pagnement sont estampillées avec le cachet d’arrivée et comparées avec les paquets mêmes. Les paquets sont ensuite inscrits dans le registre d’arrivée et puis distribués. ». [Poos, p. 249, trad. F.R.]
« Pour le traitement de paquets de tout genre (y compris les paquets à valeurs), les agences de la poste aux colis sont autonomes. Elles ont leurs propres registres de dépôt et d’arrivée et disposent d’étiquettes spécifiques à apposer aux paquets ainsi que d’un cachet à date spécial. La transmission des taxes perçues leur est certifiée par le bureau préposé, auquel ils livrent à la fin du mois leur décompte mensuel. Le médiateur entre l’agence aux colis et le bureau préposé ou le destinataire des colis est le facteur qui doit donc aussi informer les destinataires au moyen des avis d’arrivée établis par l’agence. » [Poos, p. 127, trad. F.R.]
Ce qui veut dire que les paquets n’étaient pas livrés à domicile (sauf si la localité disposait d’un bureau des postes), mais qu’il fallait aller les chercher à la station. Les destinataires étaient avertis au moyen de cartes spéciales dont on trouvera plus loin (sous 2.6.) une reproduction.
2.4. Les cachets de la poste aux colis
Comme la poste aux colis ne transportait ni lettres ni cartes postales, ses cachets ne devraient en principe se trouver que sur les adresses d’accompagnement des paquets ou sur les cartes postales spéciales mentionnées plus loin sous « Distribution des colis ».
« Les cachets à date des agences aux colis des chemins de fer étaient la plupart du temps de petit format et à cercle unique [donc du type 31 – F.R.]. L’encre à estampiller était verte. Cette disposition spéciale avait pour objet d’éviter des confusions au cas où une localité disposait d’un bureau des postes à côté d’une station des chemins de fer. » [Poos, p. 433 – traduction: F.R.]
A l’encontre de ce que prétend Poos, les agences aux colis utilisaient, outre l’encre noire, de préférence l‘encre bleue ou violette (celle-ci surtout sur le réseau Prince-Henri). La couleur verte était plutôt l’exception.
J.C. Porignon (La Poste Rurale au XIXe siècle) remarque p. 21 qu’en Belgique la couleur était verte „lorsque le bureau de traitement est l’Ambulant“ (et donc non pas une agence aux colis).
Illustration 5 : Carte de paquet (dite aussi « adresse d’accompagnement ») de la collection Ady Christoffel
2.5. L’introduction de l’affranchissement obligatoire pour paquets
« Dans notre service interne de la poste aux colis, il existe, depuis le 12 avril 1920, suivant arrêté grand-ducal du 6 avril 1920, l’affranchissement obligatoire tel qu’il était déjà prévu dans les relations internationales.
Avant cette date, on pouvait expédier à l’intérieur du pays des paquets non affranchis ne dépassant pas le poids de 6 kilos. La taxe était perçue, avec une petite majoration, auprès du destinataire et devait être inscrite au crayon bleu par le bureau distributeur sur la carte de paquet. (Ainsi p. ex., de 1907 au 1er juillet 1918, la taxe était de 5 centimes par kilo avec les minima suivants : jusqu’à 1 kg : affranchi 15 c, non affranchi 25 c ; au-delà d’un kg : affranchi 25 c, non affranchi 35 c). » [Poos p. 248, trad. F.R.]
La taxe supplémentaire de 10 c avait été introduite par arrêté royal grand-ducal du 1er mars 1875. [Reis, p. 237]
2.6. La distribution des colis
Si l’agence aux colis n’était pas combinée avec un bureau de poste, les paquets n’étaient pas distribués à domicile. Les destinataires étaient avertis par carte postale spéciale (avec formulaire au verso) et devaient venir chercher l’envoi à la station. Les timbres-poste de ces cartes pouvaient porter le cachet de la poste aux colis.
« Les paquets ne sont distribués que dans les localités où il existe une perception, une sous-perception, une agence ou un relais. Les habitants des autres localités doivent aller chercher leur paquets au bureau de poste (ou aux agences aux colis ou encore aux agences auxiliaires). Ils sont avertis de l’arrivée des paquets ; à eux ensuite, d’aller ou d’envoyer les chercher. Pour les avertir, on se servait autrefois d’une formule spéciale à remplir par le bureau destinataire. Depuis le mois de juillet 1921, ces avertissements se font, pour les colis non chargés, par la simple remise de l’adresse d’accompagnement. » [Poos, p. 249 – traduction F.R.]
Illustrations 6 et 7
Carte spéciale (recto et verso) des agences aux colis invitant les clients à venir chercher leur paquet
(collection Roland Schreiner)